Avant toute chose, on va préparer l'enregistrement. Ici, on ne va pas chercher un air, ni improviser ou s'entraîner... on va enregistrer une chanson qu'on aura préalablement écrite. Le but est donc d'enregistrer "au propre", une fois le brouillon terminé. Pour ne pas avoir à refaire la même chose à chaque fois que je veux m'enregistrer, je me suis préparé un modèle vierge qui contient déjà toutes les pistes et bus dont je sais que j'aurai besoin. Cela n'empêche nullement d'ajouter ou d'enlever des éléments si le modèle s'avère incomplet, ou au contraire trop complet pour un nouveau projet.
À quoi ressemble mon modèle ?
Du côté des pistes :
- Des pistes de guitare rythmique (entre 2 et 8 selon mes projets)
- Des pistes de guitare solo (généralement 2 pistes jouées à l'identique pour grossir le son)
- Deux pistes de basse (une avec le son brut direct, une avec un simulateur d'ampli)
- Des pistes de chant lead (une ou deux en général, selon que je double la prise ou non)
- Des pistes de chant background (si nécessaires au projet)
- Des pistes de synthés (idem, le nombre de synthés dépend du projet, ça peut aller de zéro à cinq ou six)
Ensuite, ce sont des pistes pour la batterie. Il y a une piste par élément de batterie, mises en place automatiquement par le séquenceur lorsque j'insère mon plugin de batterie virtuelle :
- Grosse caisse
- Caisse claire
- Tom grave
- Tom medium
- Tom aigu
- Charley
- Cymbale crash
- Cymbale ride
- Cymbale splash
- Micro overhead
- Micro d'ambiance de la pièce
- Micro piezzo
- Une piste MIDI sur laquelle se trouve la partition de la batterie.
Parmi mes bus, j'ai un groupe pour les guitares, un pour la basse, un pour les voix, un pour la batterie, chacun étant redirigé vers un bus Master qui sort sur mon interface audio et mes enceintes. Voici un petit schéma général :
L'enregistrement d'une vraie batterie acoustique est un véritable casse-tête quand on n'a pas l'habitude. Même pour les pros, c'est un processus qui prend du temps : il n'est pas rare de passer plusieurs heures à placer et régler les micros autour de la batterie avant de pouvoir enregistrer. Mais nous, on va se contenter d'une batterie en boîte puisque nous sommes en home studio. Ce sera donc à base de fichiers midi... Pour les home-studistes chanceux qui disposent d'une batterie acoustique (l'électronique peut se brancher en midi et on récupère directement la partition pour la retravailler à loisir) et qui contrairement à moi savent jouer de la batterie, vous allez donc vous enregistrer avec des micros. Je ne peux pas vous aider pour l'instant, je ne connais pas assez le sujet, mais je suis sûr que d'autres sites sauront vous donner un coup de main. Moi, je vais me contenter de vous parler de ma façon de procéder.
Première chose, pourquoi commencer par la batterie ? C'est simple, cela va nous servir de métronome. Le son de la batterie nous servira de guide pour respecter le tempo qu'on aura choisi lors de l'enregistrement des autres instruments et du chant. Cela permettra donc au morceau d'être joué selon un tempo régulier, et évitera de voir la chanson accélérer et ralentir en permanence. Cela dit, les fluctuations peuvent être intéressantes et apporter au morceau un côté moins mécanique qu'un tempo parfait. Mais bon, partons du postulat que pour une chanson enregistrée en studio, même s'il n'est que "home", ce n'est pas un mal de chercher la régularité.
Dans mon cas, je n'ai généralement aucune idée de ce à quoi ressemblera ma piste de batterie au final. En fait, je ne l'ajuste qu'une fois le morceau déjà enregistré. Mais j'ai tout de même besoin de sa fonction de métronome pour enregistrer les autres instruments. Je me crée donc une piste de batterie qui se répète en boucle, en tâchant tout de même d'utiliser un rythme qui se marie avec ce que je vais jouer. Par exemple, je vais utiliser l'une de ces boucles :
(fichier mp3)
(fichier mp3)
(fichier mp3)
(fichier mp3)
Chaque extrait comporte une ou plusieurs boucles "normales" puis se termine par une boucle "fill" que je vais placer en général à l'endroit où un changement se produit dans le morceau, comme le passage de l'intro au couplet, ou bien du couplet au refrain. Cela me permet de me repérer plus facilement lors de l'enregistrement.
Je remplis ainsi ma piste de batterie du nombre de mesures prévues pour la chanson, en prenant soin d'ajouter quelques mesures au tout début (2 mesures par exemple, comme montré ci-dessous), qui serviront de base pour se caler et commencer l'enregistrement dans le tempo. Ces mesures supplémentaires seront supprimées à la fin.
Rappelons que nous sommes ici dans les conditions d'un home studio, en appartement et qu'il n'est absolument pas envisageable de jouer sur un bon gros ampli à lampes de 100 watts sans faire hurler les voisins. On part donc du principe qu'on enregistre les guitares et la basse directement via l'interface audio, sans passer par un vrai ampli et un micro placé devant. Cette dernière solution est sans doute pourtant préférable, mais l'un des gros avantages de l'enregistrement en direct couplé à un simulateur d'ampli, c'est qu'il est possible de changer de sonorité a posteriori, sans avoir à réenregistrer. Il suffit de changer les réglages du simulateur ou de changer de simulateur.
Alors, la basse ou les guitares d'abord ? Il n'y a pas de réponse absolue à apporter. On pourrait considérer que le duo basse-batterie constitue le fondement d'un morceau, la base rythmique sur laquelle s'appuie et se cale tout le reste. C'est pas faux. Mais cela dépend aussi d'autres facteurs : par exemple, celui qui va enregistrer est peut-être plus à l'aise avec une guitare qu'avec une basse, et va donc privilégier sa guitare en l'enregistrant en premier. Ou peut-être que le morceau présente au contraire un riff de basse très important qui impose de l'avoir déjà enregistré une fois qu'on attaquera la partie guitare. Bref, c'est à vous de voir. Dans le doute, le duo basse-batterie est une valeur sûre. Si cette partie-là est bien en place, le reste pourra facilement venir s'appuyer dessus.
Dans les deux cas, l'enregistrement va présenter les mêmes contraintes. On branche sa guitare dans le préampli, préampli relié à l'interface audio (ou directement la guitare dans l'interface audio si on utilise seulement les préamplis de l'interface audio) et on ajuste le volume d'enregistrement. C'est très important ! Avant d'enregistrer, il faut impérativement vérifier qu'on ne risque pas de dépasser le niveau maximum (0 dB, zéro décibel). On ne dispose pas en home studio d'un ingénieur du son qui va faire les réglages pour nous. Alors c'est à nous de prendre les précautions qui s'imposent. Comment faire ? C'est simple : procédez à des essais et des ajustements, c'est rapide à faire et ça vous évitera d'enregistrer la prise parfaite, sans une erreur, pour vous apercevoir après que vos niveaux étaient trop faibles ou trop élevés, ce qui oblige à tout recommencer.
Vous pouvez faire une prise pour rien : pour la guitare rythmique par exemple, jouez les parties que vous savez être les plus fortes, les plus intenses et ajustez les volumes du préampli et de l'interface audio de manière à ce que lorsque vous jouez au plus fort sur votre guitare, le niveau d'enregistrement ne dépasse pas -6 dB, et sachez que 0 dB est la limite supérieure absolue à ne JAMAIS dépasser. Si vous avez joué lors de l'essai de la même manière que ce que vous allez jouer lors de l'enregistrement réel, alors vous serez certain que votre niveau d'enregistrement sera correct. Essayez de faire en sorte que vos pics de niveau soient situés dans une tranche de -12 dB à -6 dB environ, ce qui devrait vous donner un niveau moyen largement suffisant, tout en vous accordant une marge de sécurité avant clipping.
Le clipping, c'est le terme utilisé pour indiquer que vous tapez dans le rouge, c'est à dire que vous atteignez ou dépassez 0 dB. Le clipping, c'est le mal :-)
On voit clairement ici la différence entre un enregistrement à volume correct et le même enregistrement à niveau trop élevé. À droite, le son est écrasé, il n'y a quasiment plus d'écart entre les pics et les creux. Mais voyons cela de plus près :
En zoomant, on voit à droite que la courbe sonore est écrêtée, c'est à dire que tout ce qui dépasse 0 dB est écrasé sans ménagement. Et pourquoi c'est mal ? Parce que le son va être distordu, déformé, en un mot : saturé. Et ce genre de saturation est à proscrire, sauf si vous cherchez volontairement à obtenir une bouillie sonore qui va donner mal au crâne de vos auditeurs.
Exemple de clipping sur une voix :
Sans clipping (fichier mp3)
Avec clipping (fichier mp3)
Et sur une guitare :
Sans clipping (fichier mp3)
Avec clipping (fichier mp3)
Je préfère les enregistrer en dernier, mais il n'y a pas de règle. Si vous préférez caler votre rythmique de guitare sur la voix plutôt que l'inverse, c'est vous qui décidez.
Pour enregistrer les voix, assurez-vous qu'il n'y a pas de bruit, enfermez-vous dans la pièce, prévenez les gens qui vivent avec vous de ne pas faire de bruit et évitez de procéder à l'enregistrement pendant que le voisin fait marcher sa perceuse ! De plus, ne mettez pas le playback de la musique à fond sur les enceintes. Non, non. Mettez un casque sur les oreilles et coupez les enceintes pour éviter d'en capter le son avec le micro.
Micro statique ou dynamique ?
Les micros dynamiques ont l'avantage d'être solides, de ne pas nécessiter d'alimentation électrique, de savoir bien encaisser les pressions acoustiques élevés (exemple : grosse caisse ou saxophone) et de ne pas être trop chers. ils sont également moins sensibles au bruit ambiant que les micros statiques. Au chapitre des inconvénients, ils présentent un manque de définition dans les aigus, ce qui rend les prises de son moins bien définies, moins précises qu'avec les micros statiques. On peut les utiliser avec des prises jack ou des prises XLR.
Les micros statiques sont bien plus sensibles et précis dans leur rendu sonore. Leur sensibilité élevée est toutefois à double tranchant, car ils vont facilement capter le moindre bruit du lieu de l'enregistrement. Les ventilateurs de votre PC font du bruit ? Il y a des chances que cela s'entende lors de l'enregistrement. Votre casque audio laisse s'échapper le son ? Cela aussi sera enregistré par un micro statique. Des enfants jouent dehors un peu bruyamment ? Idem, vous risquez de capter aussi le son de leurs voix. Notons toutefois que certains micros statiques sont dits "cardioïdes", voire "hyper cardioïdes", ce qui signifie qu'ils captent le son qui vient d'une direction précise et ignorent (plus ou moins) les sources sonores provenant d'autres directions. En revanche, les micros omnidirectionnels enregistrent ce qui vient de toutes les directions. Pas idéal en home studio. Ces micros sont aussi plus fragiles (attention aux chocs) et nécessitent d'être alimentés électriquement par un type d'alimentation appelée "fantôme", dont le standard est de 48 volts. Ce type d'alimentation est soit présent sur votre interface audio et s'active avec un bouton, soit nécessite l'utilisation d'une alimentation fantôme supplémentaire à raccorder ensuite sur l'interface audio. Il faut de plus utiliser des câbles XLR à trois broches qui permettent de faire passer le courant de cette alimentation fantôme. Enfin, ces micros sont souvent assez chers. Certains valent plusieurs milliers d'euros, mais ceux-là sont à réserver aux studios professionnels, ou aux très riches amateurs. En contrepartie, le son obtenu avec un micro statique sera de meilleure qualité.
Attention toutefois, un bon micro dynamique vaut mieux qu'un mauvais statique, car il n'y a pas de secret, en microphone comme partout ailleurs, les très bas prix sont rarement synonymes de grande qualité.
Quelques marques de micros connues et réputées : AKG, Milab, Neumann, Rode, Sennheiser, Shure...
Petits conseils : achetez un pied de micro et un filtre anti-pop (vous pouvez aussi le fabriquer vous-même avec un fil de fer et un morceau de collant de votre femme / copine / mère / fille / voisine). Le pied de micro vous évitera d'avoir à tenir votre micro à la main, et donc de produire des bruits de manipulation. Quant au filtre anti-pop, son rôle est d'empêcher l'air de venir cogner contre le micro en produisant un souffle désagréable lorsque vous prononcez des "p" ou des "b" notamment.
Prises Jack (à gauche) et XLR (à droite)
Voilà, pas besoin de prolonger ce chapitre, l'enregistrement en tant que tel n'est pas ultra-compliqué. Tant que vous faites attention aux niveaux et que vous faites l'effort de soigner vos prises, vous devriez obtenir un résultat satisfaisant et utilisable pour finaliser le morceau.